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L’imam de la nouvelle Grande mosquée de Toulouse, un habitué des prêches violents et antisémites

posté le 04/07/18 par https://www.marianne.net/societe/l-imam-de-la-nouvelle-grande-mosquee-de-toulouse-un-habitue-des-preches-violents-et Mots-clés  antifa 

L’Institut de recherche des médias du Moyen-Orient (MEMRI) a publié une vidéo dans laquelle on aperçoit Mohamed Tatai prononcer des propos antisémites devant ses fidèles. Habitué aux prêches radicaux et haineux, cet Algérien est pourtant devenu une figure centrale de la Grande mosquée de Toulouse, inaugurée il y a quelques jours.

Toulouse, quartier d’Empalot, ce samedi 23 juin. C’est le grand jour attendu depuis treize ans par les musulmans pratiquants de la Ville rose : la Grande mosquée, pouvant accueillir 3.000 fidèles, est enfin inaugurée. Toutes les huiles locales sont présentes, comme le relate La Dépêche : le maire LR Jean-Luc Moudenc (l’un des premiers à avoir accordé un permis de construire pour une mosquée), la présidente de la région Occitanie Carole Delga, le directeur de cabinet du préfet de Haute-Garonne, Marc Tschiggfrey... et l’imam Mohamed Tatai, qui prononce un discours fédérateur en arabe. Évoquant la paix dès la première phrase, il explique que la Grande mosquée sera un "rempart contre l’extrémisme".

La vitrine est impeccable, mais peut-on croire en la sincérité du prédicateur ? Une vidéo publiée par l’Institut de recherche des médias du Moyen-Orient (MEMRI) jette un sérieux doute. On y aperçoit Mohamed Tatai, en habit traditionnel, livrer un discours dans une autre mosquée de Toulouse, El Nour. S’exprimant en arabe, il cite longuement un hadith (tradition islamique relative aux actes et aux paroles de Mahomet) antisémite, ayant pour thème la "bataille finale décisive" opposant musulmans et juifs. "Le jour du Jugement ne viendra pas jusqu’à ce que les musulmans combattent les juifs, énonce Tatai. Les Juifs se cacheront derrière les pierres et les arbres, et les pierres et les arbres diront : Ô musulman, ô serviteur d’Allah, il y a un Juif qui se cache derrière moi, viens le tuer – à l’exception de l’arbre Gharqad, qui est l’un des arbres des Juifs." D’après l’imam, "les chrétiens et les juifs croient aussi à ces prophéties".

    • Toulouse Imam Mohamed Tatai Recounts Antisemitic Hadith and Prophecies that Israel Will Soon Come to an End pic.twitter.com/w1s26bBL9P
    • — MEMRI (@MEMRIReports) June 26, 2018

Il enchaîne plus tard avec une autre forme de prophétie, prédisant la mort… d’Israël. Dans des propos pour le moins confus, l’imam Mohamed Tatai prête au Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou la "peur qu’Israël ne vive pas plus de 76 ans, comme il est écrit dans les prophéties des [juifs]". Puis il cite un journaliste israélien "bien connu" qui aurait déclaré, lors de l’enterrement de Shimon Peres en 2016, qu’il assistait "aux funérailles d’Israël". Ses propos sont tout récents : ils ont été prononcés le 15 décembre dernier. Sacha Ghozlan, président de l’Union des étudiants juifs de France (UEJF), a annoncé que son association portait plainte. "L’avenir de la République est en jeu quand un imam appelle à tuer des juifs", a-t-il justifié.

    • L’UEJF porte plainte contre l’imam de Toulouse pour incitation à la haine raciale. J’appelle @gerardcollomb à fermer cette mosquée salafiste et le Parquet à ouvrir une enquête. L’avenir de la République est en jeu quand un imam appelle à tuer des juifs https://t.co/I8YgFHZT3R
    • — Sacha Ghozlan (@SachaGhozlan) June 28, 2018

De nombreux prêches haineux

Il ne s’agit pas du seul discours préoccupant du prédicateur. Les différentes interventions de l’imam, toujours prononcées en arabe, sont diffusées sur la chaîne YouTube "Grande Mosquée Toulouse". Ce qui permet de se faire une idée des références idéologiques du personnage… Le 10 avril 2015, Mohamed Tatai consacre son prêche au "sacrifice pour l’islam". Il y cite Youssef Al-Qaradawi, le "grand penseur" des Frères musulmans, violemment homophobe, qui estime qu’il n’y a pas de dialogue entre nous (les musulmans, ndlr) et les Juifs, hormis par le sabre et le fusil", et préconise de battre les femmes qui montreraient "des signes de fierté ou d’insubordination". Ce penseur extrémiste, Al-Qaradawi, a été interdit de séjour en France en 2012 après les attentats… de Toulouse. Pour l’imam de la Ville rose, il est une bonne source, puisqu’il le présente comme l’auteur d’un ouvrage "de la plus haute importance sur la pensée du jihad". Mohamed Tatai, dans son prêche, ne laisse pas d’autre option qu’une adhésion totale à la religion à ses fidèles : "Celui qui doute de son islam, qu’on le combatte, qu’on se brouille avec lui, qu’on soit en colère à son encontre, parce que le musulman est fier de ce joyau (l’islam, ndlr) !" A peine trois ans après l’attentat sanguinaire perpétré par Mohamed Merah à Toulouse, l’imam édicte que "le sacrifice dans la voie d’Allah est le jihad suprême", qui mènerait "au martyre que les anges lavent"...

Régulier dans l’outrance, Mohamed Tatai s’en était pris à l’Occident et à ses valeurs lors d’un sermon du 4 février 2011, toujours devant des fidèles à la mosquée El Nour. Le texte de son intervention fait état d’une violente hostilité à la démocratie, décrite comme une "religion bizarre" qui sert "à protéger les châteaux et à garder le dictateur". Une technique habituelle des islamistes est utilisée par l’imam : la victimisation des musulmans, qui seraient la cible immuable des persécutions des Occidentaux et des juifs. L’imam dénonce ainsi les "intentions destructrices envers la communauté, visant à diminuer son influence et à la mettre sous le protectorat légal de certains individus (...)". Dans des discours qui rappellent par instants ceux de l’ex-président du CCIF Marwan Muhammad, Tatai exhorte les musulmans à "cesser de [s’]écraser". Le gouvernement ? "Des gens qui ont déclaré la guerre à Allah", des "tyrans", alors que l’islam "ne sème que le bien autour de lui" et que ses fidèles forment "une communauté supérieure". La politique des pays occidentaux au Moyen-Orient est dénoncée comme celle "d’envahisseurs qui épuisent [les] ressources avec l’aide de quelques traîtres". Les "martyres" des Occidentaux, enrage l’imam, sont "une simple statistique qui passe inaperçue sur les articles des journalistes enragés de pouvoir et de fortune". Peu de chances que de tels discours contribuent à construire des relations apaisées.


Figure religieuse locale

Ces prêches posent grandement question, alors que plusieurs milliers de fidèles sont amenés à fréquenter la nouvelle Grande mosquée de Toulouse. Mais Mohamed Tatai s’est imposé comme une figure de la vie religieuse locale. Originaire d’Algérie, il a émigré en France à la fin des années 1980 pour s’installer dans la Ville rose. Lorsqu’il s’adresse aux médias, il ne parle en revanche jamais en français. Prêchant dans diverses mosquées, il a également fondé une association, le Cercle de dialogue civilisationnel (CDC) qui a propulsé la construction de la Grande mosquée en récoltant 6 millions d’euros de dons pour financer l’édifice doté d’un minaret et d’un dôme doré. Une somme à laquelle ont contribué deux Etats étrangers, le Koweït (131.000 euros) et l’Algérie (213.000 euros) d’après le site Actu.fr. Mohamed Tatai doit être la figure centrale de ce grand lieu de culte, construit pour fournir un espace de prière décent aux 40.000 musulmans qui habitent Toulouse. Sur la page web de la mosquée, l’adresse de contact est à son nom. C’est lui qui a prononcé le plus long discours lors de l’inauguration du lieu de culte, confiant symboliquement les clés du bâtiment au maire de Toulouse.

Habile, l’imam semble jouer un double jeu : en public, il loue la construction de la mosquée comme "une preuve du respect et de la tolérance des habitants de Toulouse", et tient un discours de paix, même lorsqu’il subit une agression en 2005 (il indique alors qu’il continuera à suivre une "voie de modération et de persévérance"). Mais ses prêches violents indiquent, au contraire, une volonté d’attiser les haines entre les musulmans et les autres citoyens. Alerté des propos de l’imam, Jean-Luc Moudenc a adressé un courrier au préfet de la région Occitanie pour qu’il se saisisse de l’affaire, a indiqué la mairie de Toulouse à Marianne. Après avoir procédé à la vérification du prêche antisémite, le préfet a fait appel au parquet de Toulouse, qui a lancé une enquête pour incitation à la haine. D’après France 3, "une première traduction a été opérée par des services spécialisés mais restait ce vendredi à affiner en raison des différences entre arabe littéraire et arabe dialectal." Les pouvoirs publics et judiciaires ne sont pas les seuls à s’intéresser à Mohamed Tatai, puisque l’imam a été convoqué à Paris. Ce lundi 2 juillet, il fera face à Dalil Boubakeur, recteur de la Grande mosquée de la capitale, qui "exige des explications" sur "l’utilisation de ce hadith" antisémite.


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