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La Ville de Bruxelles sanctionne des défenseurs du droit à l’avortement

posté le 10/09/18 par Collectif Haricot rouge Mots-clés  répression / contrôle social  genre / sexualité  féminisme 

Le 22 avril dernier, des militant·e·s pro-choix ont perturbé pacifiquement la “Marche pour la vie”, afin d’exprimer une opposition à ce cortège anti-avortement. Une vingtaine de contre-manifestant·e·s ont alors été encerclé·e·s et arrêté·e·s par la police, et sont aujourd’hui menacé·e·s d’une sanction administrative communale (S. A. C.) ainsi que de poursuites judiciaires pour « entrave méchante à la circulation ».

Réuni·e·s sous le nom de « collectif Haricot rouge », les militant·e·s pour le droit à l’IVG ont perturbé la manifestation pro-life afin de protester contre ses discours réactionnaires attaquant les droits des femmes et des personnes LGBT, et d’attirer l’attention sur les dangers de la limitation du droit à l’avortement. Victimes d’une première répression de la part des autorités, 25 des militant·e·s présent·e·s ont alors été encerclé·e·s puis arrêté·e·s par la police.

Non contente de cette première entrave à la défense du droit à l’IVG et à la liberté de manifester, la Ville de Bruxelles pousse plus loin encore sa logique répressive. Cet été, elle a fait parvenir aux personnes arrêtées un courrier les informant de son choix d’entamer une procédure administrative contre chacune d’entre elles, pour avoir « participé, sans autorisation, à une manifestation ». Il s’agit d’une infraction au règlement général de police de la ville pouvant déboucher sur une amende allant jusqu’à 350 euros. Le procès-verbal de police stipule également la volonté d’entamer des poursuites judiciaires à l’encontre des manifestant·e·s : « Un procès verbal judiciaire distinct a été établi pour entrave méchante à la circulation et transmis au Procureur du Roi.  »

Dans le cadre de la procédure administrative, nous avons rédigé collectivement une lettre de défense, envoyée au fonctionnaire communal en charge, et certain·e·s prévoient également de présenter une défense orale. Nous tenons à dénoncer publiquement le choix de la Ville de Bruxelles de pousser encore plus loin la répression à l’encontre de cette action. Dans un contexte où les autorisations de contre-manifestation sont très rares, cette procédure est une attaque fondamentale contre les libertés démocratiques.

Les poursuites pour entrave méchante à la circulation, si elles ont lieu, constituent une attaque encore plus grave à la liberté de manifester. Cette utilisation du code pénal à l’encontre des mouvements sociaux n’est, hélas, pas une première. En effet, les autorités l’ont déjà mobilisé dans ce sens deux fois cette année : 17 syndicalistes liégeois sont renvoyés devant le tribunal correctionnel pour le blocage d’un viaduc autoroutier en octobre 2015 et pourraient bien pâtir de la décision, en juin dernier, du tribunal correctionnel d’Anvers. Celui-ci a jugé le président de la FGTB Anvers coupable d’entrave méchante à la circulation suite à l’action syndicale nationale du 24 juin 2016 près du port d’Anvers. Le caractère politique du procès d’Anvers n’a échappé à personne, et la FGTB a annoncé porter ce jugement scandaleux en appel. Si la culpabilité du syndicaliste est maintenue, il s’agira d’un tournant très inquiétant pour le droit de grève, mais aussi plus largement pour le droit à manifester. L’utilisation vicieuse de cette infraction pénale à l’encontre des mouvements sociaux était pourtant encore en 2015 déclarée inappropriée par la Chambre : «  L’entrave à la circulation doit être commise « méchamment », cela signifie que l’acte doit être commis dans le but exprès de réaliser la conséquence interdite par la loi, en l’espèce entraver la circulation. La loi ne vise pas à interdire l’exercice normal du droit de grève et des manifestations, au cours desquelles il peut arriver qu’à un certain moment la circulation soit bloquée d’une manière normale, volontaire, mais pas méchante, par des groupes de manifestants se trouvant sur la voie publique.  »

Ces attaques interviennent également dans un contexte politique belge marqué par le débat sur la dépénalisation de l’avortement, dont l’issue paraît bien sombre. Le texte défendu par la majorité et le CDH prévoit, en effet, de maintenir des sanctions pénales à l’égard des femmes ainsi qu’un délai de réflexion de 6 jours, et n’escompte pas allonger le délai de gestation endéans lequel est autorisée l’IVG. La Ville de Bruxelles et son bourgmestre PS Philippe Close, en faisant le choix de poursuivre les militant·e·s pro-IVG et d’empêcher toute opposition pacifique à des mouvements rétrogrades dans l’espace public bruxellois, se positionnent clairement du côté des réactionnaires.

Camille, participante à l’action et visée par la procédure administrative, déclare : « Cette tentative de criminalisation de toute opposition ne passera pas, nous ne nous tairons pas face à ces mouvements qui veulent limiter nos droits. Ni aujourd’hui, ni demain. »


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