Nos amis de l’Union des Juifs pour la Résistance et l’Entraide (UJRE) s’indignent à très juste titre de la réception par les plus hautes personnalités françaises d’Andriy Parubly, président du Parlement ukrainien et dirigeant du parti « Svoboda ». Ce parti, qui glorifie la collaboration avec l’Allemagne nazie, est l’héritier de ceux qui ont servi de guides et d’exécutants dans l’extermination des Juifs ukrainiens.
La présence de partis antisémites au pouvoir en Europe centrale et orientale augmente de manière inquiétante depuis quelques années.
Dans les pays Baltes, on célèbre régulièrement la résistance nationale face à l’invasion soviétique de 1940, après le pacte germano-soviétique. Mais on a choisi d’oublier que, dans cette résistance, il y a eu d’authentiques criminels de guerre qui ont servi d’auxiliaires aux Einsatzgruppens. C’est ainsi que 2 000 vétérans lettons de la Waffen SS ont défilé à Riga le 16 mars 2014.
En Pologne, la radio antisémite Mariya a fortement contribué à l’accession au pouvoir du parti « Droit et Justice » des frères Kaczynski. La Pologne vient de voter une loi négationniste qui punit quiconque rappelle une vérité historique avérée, à savoir que certains Polonais ont collaboré à l’extermination des Juifs.
Tous ces partis ont en commun de soutenir sans réserve Israël dans sa guerre contre le peuple palestinien. Au Parlement européen, ils ont voté sans restriction la définition sioniste de l’antisémitisme, celle qui considère que critiquer Israël est antisémite [1].
Y a-t-il une contradiction ? Non. Les Juifs ont été longtemps des « parias » en Europe (pour reprendre les termes d’Hannah Arendt) considérés comme des Asiatiques inassimilables. En Israël, ils deviennent des colons européens en Asie.
Le sionisme, dès son apparition, a tout fait pour qu’un maximum de Juifs quittent l’Europe. Du ministre pogromiste Plehve en Russie (1903) à Lord Balfour (1917), les antisémites ont apprécié et soutenu cette entreprise.
Un des cas les plus emblématiques aujourd’hui est celui de la Hongrie de Viktor Orban. Celui-ci a entrepris la réhabilitation du régime du Maréchal Horthy, régime pronazi qui a activement collaboré à l’extermination des Juifs hongrois. Le gouvernement hongrois a entrepris une campagne antisémite contre Georges Soros, juif états-unien d’origine hongroise. En visite à Budapest le 18 juillet 2017, Nétanyahou a félicité Orban en qualifiant Soros « d’ennemi d’Israël ».
En Europe occidentale, tous les dirigeants d’extrême droite ont fait la visite en Israël à l’invitation de Lieberman : l’Autrichien Strache, le Néerlandais Wilders, le Flamand Dewinter. Marine Le Pen n’a pas encore fait le voyage, mais son compagnon, le député Louis Aliot, a visité en décembre 2011 les colonies de Shilo et Eli qu’il décrit comme des villages de Judée-Samarie.
Le journaliste israélien Gideon Lévy a écrit le 20 novembre 2016 dans le journal Ha’aretz, juste avant l’investiture de Trump : « Tout à coup, il n’est plus si horrible d’être antisémite. Soudain, il est devenu excusable de haïr les musulmans et les Arabes à condition « d’aimer Israël ». Les droites juive et israélienne ont décrété une large amnistie aux amants antisémites d’Israël. Et ce sont ces derniers qui vont bientôt exercer le pouvoir à Washington. »
Il pensait à Steve Bannon qui a été le premier conseiller de Trump. Le discours de Gideon Lévy s’applique à l’ensemble des Chrétiens sionistes. Pour ces évangélistes (et le vice-président Mike Pence en fait partie), les Juifs doivent retourner en terre sainte pour favoriser le retour du Christ, chasser le mal, Armageddon, c’est-à-dire les Arabes, les musulmans, puis se convertir à la « vraie foi » sous peine de disparition. Ces antisémites ont donné des milliards de dollars pour financer la colonisation.
Il y a plus d’un siècle, les antisémites ont aimé le sionisme, prêts à l’aider pour faire partir les Juifs d’Europe. Ils l’aiment toujours.
L’UJFP dénonce vigoureusement ces alliances du gouvernement israélien avec l’extrême-droite européenne, qui ne peuvent que conduire à une explosion de violence tant en Europe qu’au Moyen-Orient.
Le Bureau national de l’UJFP, le 15 juin 2018