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Petit reportage au Camp Climat à la frontière allemande.

posté le 17/08/15 par miluskaya Mots-clés  action  alternatives  luttes environnementales  libération animale  genre / sexualité  féminisme 

Du 07 au 17 aout se tenait un Camp Climat en Allemagne, plus précisément à Lutzerath, en Rhénanie, non loin d’Aix-la-Chapelle, autrement dit, à la frontière avec la Belgique.
Tout d’abord nous sommes alléEs faire un tour à la forêt d’Hambach (voir le blog des activistes) à une cinquantaine de kms de là ou se tient une ZAD depuis maintenant quelques années, afin de défendre ce qui reste de forêt, puisque la mine est destinée à s’étendre (elle a déjà une surface aussi étendue que celle de la ville de Cologne !). Une petite cinquantaine d’activistes allemands et étrangers étaient sur place au moment de notre visite. A l’extérieur du bois se tient le campement principal : tentes, constructions terre-paille, caravanes. Dans les bois les activistes ont construit des cabanes hautes dans les arbres. Ils signalent que régulièrement la police vient couper le bout des cordes, ce qui empêche les activistes de redescendre ou remonter dans les arbres.
De l’autre côté du bois, il y a la route qui mène à la mine, ou les activistes construisent régulièrement des barrages afin de bloquer l’accès des ouvriers à la mine. Les ouvriers se fâchent souvent argumentant qu’ils font ce travail pour leurs enfants…

Nous décidons d’aller au Camp Climat, car nous entendons qu’une action massive de désobéissance civile pacifique est prévue pour le samedi. Nom de l’action : Ende Gelände !
Lutzerath est un petit bled destiné à être rasé lui aussi , par la mine de Garzweiler , une mine de lignite à ciel ouvert sensiblement aussi grande que celle qui détruit la fôret d’Hambach, et destinée à presque doubler de surface à l’horizon 2045.
Dur revers de la politique anti-nucléaire menée par le pays, ceci couplé à l’achat massif de crédits-carbone, ce qui lave les mains de l’état allemand, mais qui ne nous laisse pas pour autant dupes sur l’effet climatique réel du carnage écologique.
En effet, ces mines sont creusées à la place de forêts datant de la dernière aire glacière, et donc constituent une réserve de charbon gigantesque.

L’ambiance dans le camp est fort agréable, il y a sur place des gens de toutes les nationalités européenne majoritairement, malgré l’appel aux sans-papiers à aussi rejoindre le camp. Une quantité d’ateliers ont lieu chaque jour, ainsi que des concerts le soir. Voir le programme. Beaucoup d’intervenants étrangers adressent aussi leurs messages et poussent le signal d’alarme (voir ici quelques videos du collectif freundekreis)
Sur place, la consommation d’alcool est restreinte à certaines aires, et le bar ne commence la vente de bière (bio) qu’à 21h. Nous saluons le compromis judicieux qui a été pris. Une autre mesure auquel nous n’adhérons pas est celle qui a été prise concernant le "topless" (le fait de se mettre torse-nu) qui a été interdit au camp, pour les hommes comme pour les femmes, alors qu’il règne une chaleur de plomb. L’argument qu’ils arguent ne semble pas tenir la route. Il semblerait qu’il y ait parmi les organisateur-ices l’une ou l’autre personne ayant vécu un trauma qui lui rend difficile la vue d’un torse-nu masculin. Ensuite l’organisation défends le bannissement du topless comme étant un acte discriminant pour les quels et les personnes complexées. Enfin, ils avouent que se mettre seins nus est aussi un acte d’émancipation féminine, mais disent que c’est un long chemin, et que donc ils renoncent à en faire partie (lire ici leur argumentation entière). Néanmoins plusieurs femmes (et quelques hommes) ont décidé de faire infraction à cette règle. Une affiche a été collée à l’entrée du camp par un groupe ("the tits libération front") expliquant que la nudité doit être désexualisée, et que pour le faire, le meilleur chemin est de la pratiquer, qui plus est dans les lieux progressistes, avec des photos des manifs de femmes torse-nus récentes au Canada. Espérons que cette pratique conservatrice du rhabillage ne se dissémine pas à l’intérieur de nos milieux contestataires.

Le voisin nous laisse glaner son champs :

La préparation à l’action du samedi est intense les jeudi et vendredi. Des ateliers se tiennent sur la constitution d’un groupe d’affinité, sur les stratégies à adopter en cas de confrontation policière (avec jeux de rôles ou des groupes jouent la police, et d’autres les manifestantEs), sur les aspects juridiques et légaux de l’action, sur les limites personnelles face à la violence policière. Ces ateliers ont donnés très intelligemment, par des activistes expérimentéEs, alors que sur place il y a aussi beaucoup de néophytes. Dès le vendredi nous atteignons plus de 1000 participantEs qui déclarent participer à l’action du lendemain.
Les derniers briefings ont lieu à 21h ou nous ne savons toujours pas l’heure de l’action si ce n’est que ce sera proche du lever du soleil et qu’à partir du réveil, il y aura une heure pour se préparer et lever le camp. Nous recevons des tenues blanches, ainsi que des masques de protection anti-poussière, et une feuille de plastique avec un élastique destinée à nous protéger des gaz de poivre (à ne pas confondre avec les gaz lacrymogènes que les flics allemands n’utilisent pas beaucoup -probablement depuis une certaine époque où ils étaient friands d’un autre type de gaz mis au point par Bayer…).

La stratégie est de se diviser en 4 groupes différents, les "doigts". L’idée est que chaque doigt force les barrages policiers. Il y a les doigts rose/jaune/ bleu / vert. Le doigt vert est le groupe international, ou la lange d’usage est l’anglais. Ceux qui constituent l’ongle du doigt s’équipent aussi de sacs de foin pour se protéger des coups de matraque des policierEs.
Démarrage du doigt vert aux alentours de 6h du matin. Chaque doigt a un parcours spécifique. La difficulté est de franchir l’autoroute, sous laquelle il n’y a que quelques ponts, défendus évidemment par les cordons de flics et leurs camionnettes. D’un pas décidé et en colonne bien compacte nous franchissons le barrage policier, recevant des coups de matraque et du gaz dans le visage. Mais les feuilles de plastique sont relativement efficaces.
Certaines personnes sont arrêtées, mais le groupe continue sa trajectoire. C’est le but. Aller jusqu’à une machine d’extraction dans la mine afin de rejoindre les autres groupes et d’y suspendre des bannières. Un autre barrage plus loin. Nous passons à travers champs et sommes plus rapide que la police qui peine à nous arrêter.

Enfin nous entrons dans la mine. Un haut parleur de police nous exhorte de faire demi tour en allemand. Le message tourne en boucle et d’une voix monotone, mais personne n’en fait cas. A l’arrivée dans la mine, c’est la joie générale. Le spectacle de le mine est fascinant et épouvantable, et les machines d’extraction sont énormes.

Plus bas, des ouvriers chargés de la sécurité de la mine tentent de nous bloquer sans succès, mais quelques minutes plus tard, sont rejoint par des policiers que noue ne savions naïvement pas être autorisés à entrer dans la mine. Alors que nous avançons d’un pas rapide vers la machine, ils encerclent finalement le groupe à grands coups de matraque et de gaz, et le doigt se retrouve divisé en 3 groupes d’une quarantaine de personnes, alors qu’un petit groupe a réussi à s’échapper, en escaladant les talus. Il est environ 9h du matin.

L’écrasante majorité des activistes est venue sans ses papiers d’identité. Les policiers sont complètement dépassés par les évènements (alors qu’eux aussi sont un millier). Ils maintiennent les groupes sur place alors que chacun retire calmement les colsons trop serrés via des techniques qui feraient pâlir Mac Gyver. L’ambiance est à la fête chez les activistes malgré leur arrestation, car ils/elles apprennent les nouvelles au fur et à mesure via des messagerEs qui crient en haut du talus qu’un groupe a réussi à prendre la machine, et à y suspendre les bannières. Nous apprenons aussi que la mine entière est à l’arrêt. Un autre doigt qui avait été arrêté a été complètement relâché, tellement les flics étaient dépassés. Ce n’est qu’à 18h qu’un bus vient finalement cueillir les activistes pour les amener au poste de police de Aachen, qui est déjà plein, comme celui de Cologne. Résultat, le bus libère les activistes à une station de train, pour rentrer au camp. Le legal team supervise les navettes pour aller chercher les rescapéEs.
Au camp, c’est l’accueil chaleureux par grands cris et serrages dans les bras de la part de ceux/celles restéEs au camp, qui se sont cotiséEs pour acheter des casiers de bière (bio) pour les libéréEs. Un buffet à aussi été dressé.

Nous repartons le lendemain alors qu’il a plu toute la nuit et que c’est bien parti pour qu’il pleuve toute la journée. RaviEs des belles rencontres, de la sublime organisation de l’action, et de sa stratégie efficace. Une bien belle expérience en somme…

Médias alternos sur les réseaux sociaux :
[Album Photos Flickr de 350.org] [Twitter : #endegelände // #Garzweiler ]

Videos :
"Ende Gelände : Here, But No Further", réalisée par 350.org (sur youtube)

Revue de presse en allemand (articles/photos/videos) par HambacherForst


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